L’Abbé Bérenger Saunière
Sermons
Antugnac
4 mai 1890 – 12 juin 1891

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Dimanche dans l'octave du Corpus, Ile après la Pentecôte. Solennité de la fête du St Sacrement. Catéchisme à 6 h. 8h. messe, procession dominicale - Prône sur l'origine de la fête du Corpus. - 8 juin.

L'Église n'a institué la fête du T. S. Sacrement que dans le XIIIe siècle. Pendant les douze premiers siècles, on se contenta de' célébrer l'anniversaire de l'institution de l'Eucharistie, le jeudi de la Semaine Sainte. Mais quelques hérétiques ayant osé blasphémer contre ce Sacrement, et élever des doutes sur la présence réelle de J. C. sous les espèces Eucharistiques, l'Église jugea à propos d'établir une fête particulière en l'honneur du Corps et du Sang de J. C. réellement présent sur nos autels. On donna à cette fête le nom de fête du T. S. Sacrement; on l'appela aussi et on l'appelle encore la Fête-Dieu, la fête de Dieu, la fête du Corpus ou du Corps du Seigneur.

Maintenant, de qui Dieu se servit-il pour l'institution de cette fête ? Il se servit d'une Sainte fille nommée Julienne.

Née en 1193, au village de Rétienne, près Liège, Julienne devenue orpheline à l'âge de cinq ans, fut confiée aux religieuses du monastère de Cornillon, à l'extrémité d'un faubourg de cette ville. Elle s'y distingua par son application à l'étude, au travail et aux vertus les plus sublimes de la perfection Chrétienne, et surtout par un ardent amour pour l'adorable Sacrement de nos autels. Eclairée d'en haut, on la vit, pendant une longue suite d'années, préoccupée de cette pensée, qu'il manquait à l'Eglise une brillante clarté, parce qu'il manquait à son Divin Epoux une fête spéciale en l'honneur de son Corps Sacré et de son précieux Sang. Elle en parla à Jean de Lausanne, homme d'une vertu singulière et chanoine de St Martin. de Liège, celui-ci en parla à son tour à Jacques Pantaléon, archidiacre, et à plusieurs autres personnes distinguées par leurs lumières et leur piété. Ils jugèrent tous unanimement que c'était une chose juste en soi et très utile à l'Église de célébrer l'institution de l'Eucharistie avec plus de pompe et de magnificence qu'on ne l'avait fait jusqu'alors. Malgré. cela, Julienne eut longtemps la douleur de voir ses intentions méconnues et ses vues traversées : c'est le propre de toutes les grandes choses qui se font dans l'Église de s'établir et de se fortifier au milieu des obstacles et des contradictions. Enfin, après vingt ans de luttes, de contrariétés et d'inutiles démarches, un pieux Evêque, Robert de Torotte, qui du siège de Langres avait passé à celui de Liège, mit le comble à ses voeux. Il porta l'an 1246, pou r. tout son diocèse, le décret d'institution de la fête de Dieu, fixée au Jeudi après la Trinité, et s'en fit lire l'office pendant la maladie dont il mourut peu après. Les chanoines de la Collégiale de St Martin furent les premiers à célébrer cette touchante solennité. Mais il s'en faut qu'elle fut également bien accueillie ailleurs.

La Sainte fut même traitée de visionnaire, le fête de nouveauté : c'était disait-on, assez honorer le St Sacrement, que de célébrer journellement le St Sacrifice de la messe; une fête spéciale paraissait superflue. Ainsi les uns rejetèrent ouvertement la solennité les autres firent leurs réserves, jusqu'à ce que l'Église Universelle eut parlé. Elle parla enfin cette Eglise Universelle, et ce fut l'ancien Archidiacre de Liège, Jacques Pantaléon, devenu Pape sous le nom d'Urbain IV, qui en fut le premier organe. Il publia le 8 Septembre 1264, une bulle pour étendre la fête à toute la Chrétienté, et chargea St Thomas d'Aquin, alors professeur à Orvieto, d'en composer l'office. Urbain IV mourut l'année même qu'il publia la bulle dont nous venons de parler. Après sa mort, les guerres intestines qui troublaient alors l'Italie firent oublier la nouvelle fête; et à l'exception du diocèse de Liège, on ne la célébrait nulle part. Plus de 50 ans après, Clément V, dans le concile de Vienne, ordonna la mise à exécution de la bulle d'Urbain IV, et alors la fête commença à être généralement célébrée. Jean XXII; successeur de Clément V décréta que la Fête-Dieu serait solennisée avec octave et qu'on porterait le SI Sacrement en procession. Martin V ordonna que la fête se célébrât au son des, cloches. Enfin, Eugène IV, en 1433, confirma la bulle de Martin V, enrichit la fête de nombreuses indulgences et voulut que tous les Evêques de la Chrétienté publiassent à ce sujet des lettres pastorales dans toute l'étendue de leurs diocèses.





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